Trets, petite commune de 12 000 âmes nichée au pied de la montagne Sainte-Victoire en Provence, est une sorte d’îlot médiéval dans notre époque. Le monde s’agite, s’accélère, trépigne… mais cette ville maintient un rythme de vie comme figé dans une autre époque.

À l’ombre de son château, de ses remparts et près de son église qui renferme de sacrés trésors classés, les habitants prennent le temps de se saluer dans la rue, de discuter longuement au marché, de partager un café qui s’étire sur une heure. Ce n’est pas de la lenteur par défaut, mais un choix conscient ou inconscient de privilégier la qualité des relations humaines au détriment de la quantité d’activités.

Cette temporalité différente n’est pas vraiment une question de taille, encore moins de lieu. C’est une culture locale qui résiste doucement. Rien de caricatural quand on dit que les commerces y ferment encore deux heures pour le déjeuner. Les terrasses de café restent occupées en milieu d’après-midi par des retraités qui refont le monde. Les enfants rentrent de l’école à pied, accompagnés de parents qui en profitent pour échanger quelques mots.

Enclave magnifique, dans notre époque qui célèbre la vitesse et l’absence de friction. Les casinos en ligne en sont un exemple parfait : plus besoin de se déplacer entre copains à Biarritz ou Enghien-les-Bains, on joue instantanément depuis son salon sur ces plateformes web de poker, blackjack et autres machines à sous.

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C’est un peu l’incarnation de notre désir moderne : accéder immédiatement à ce qu’on veut en termes de divertissement et d’amusement, sans barrière, sans attente.

À Trets, le marché du mercredi (sur l’avenue Mirabeau, le Boulevard de la République et l’Avenue Jean Jaurès) représente l’exact opposé de cette sorte d’instantanéité. Les habitants ne viennent pas seulement acheter des tomates et du fromage de chèvre. Ils viennent prendre des nouvelles du fils de la marchande de fruits, discuter de la météo avec le poissonnier, débattre des dernières annonces du Conseil régional avec le boucher, etc.

Une course qui pourrait prendre vingt minutes dans un supermarché… s’étend facilement sur deux heures. Mais ces deux heures construisent du lien social, de la confiance, de l’appartenance à une communauté. Pareil sur les marchés de nuit durant l’été, qui ont lieu certains vendredis, et réunissant artisans, producteurs locaux et musiciens.

Les cafés du centre-ville ne sont pas différents. Le Café de la Gare n’est pas qu’un lieu de consommation rapide. C’est un espace où les habitués ont leur table, où le patron connaît les prénoms et les habitudes de chacun, où un expresso peut être le prétexte à une conversation d’une heure sur les travaux de la Grand Rue ou les résultats du club de football local. Ces interactions répétées, sans urgence ni objectif précis, tissent progressivement des relations profondes.

Cette lenteur permet quelque chose que notre monde rapide a presque oublié : l’émergence naturelle de l’entraide. Quand on croise les mêmes personnes chaque jour, quand on prend le temps de les connaître au-delà de leur fonction, l’aide est forcément plus naturelle, on appréhende moins de la demander.

Typiquement, c’est le voisin qui arrose vos plantes pendant les vacances, la commerçante qui met de côté le pain quand elle sait que vous rentrez tard, le retraité qui propose de récupérer les enfants à l’école, etc. Ces gestes ne naissent pas d’applications collaboratives ou de plateformes d’entraide, mais de la simple proximité humaine des Tretsois entretenue par le temps.

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